La profonde
conviction du confucianiste que le ciel est rond et la terre est
carrée, ne représente qu’une fausse idée.
Voilà, la
conclusion de la Grande Personne!
Sur cette
thèse, elle savait déjà pas mal de choses. Selon elle, cette idée était apparue
dès l’antiquité.
« A cette
époque là, faute de vaisseaux spatiaux, l’homme n’avait pas eu les moyens de
savoir si la Terre était ronde. Le Ciel s’était montré aux yeux des hommes de
l’antiquité, énigmatique comme une grande voûte obscure, sur laquelle des
étoiles semblaient comme des taches ardentes toutes sensiblement fixées. Et le
Soleil s’était déplacé chaque jour sur cette voûte, surgissant des mers à l’est
et plongeant à l’ouest dans l’océan,» raconta expressivement la Grande
Personne.
Le petit
confucianiste fut bien surpris de l’idée de la Grande Personne. Il se
demanda en lui-même : « Comment peut-elle savoir
cela ? »
Selon lui, les yeux de l’homme de l’antiquité
devaient être pareils à ceux de l’homme d’aujourd’hui. Si l’homme de l’antiquité
voyait le Ciel comme une grande voûte, pensa-t-il, l’homme d’aujourd’hui
apercevrait la même chose. En revanche, si l’homme d’aujourd’hui ne trouvait
pas une voûte dans le Ciel, ce serait donc difficile de croire qu’elle avait été
aperçue dans les yeux de l’homme de l’antiquité. Car l’homme de l’antiquité
observe le même Ciel que celui de l’homme d’aujourd’hui, ils doivent donc
éprouver la même sensation face au même Ciel.
« Quel
dommage donc que je ne puisse voir le Ciel tel une grande voûte! Je suis sûr
que ce serait très joli ! » pensa le petit confucianiste.
Comment la Grande Personne pouvait-elle le savoir ?
Mystère !
Avec une certaine admiration, le petit confucianiste se dit : « Je n’arriverai jamais à son niveau ! Alors, ça ne fait pas de moi un grand confucianiste ! »
Mystère !
Avec une certaine admiration, le petit confucianiste se dit : « Je n’arriverai jamais à son niveau ! Alors, ça ne fait pas de moi un grand confucianiste ! »
Cependant, ce qui étonna, c’était que la Grande
Personne ne voulût plus conserver son privilège. Elle expliqua au petit
confucianiste ceci:
« Heureusement, tout ça c’est du passé. C'est au vingtième siècle, grâce à l’apparition de grands télescopes et de
technologies modernes, telle la construction de la station spatiale etc., que nous avons pu réaliser nos rêves prodigieux. Alors, la science nous a
offert un nouveau monde, avec lequel, nous pouvons vraiment écraser toutes les
fausses idées de l’antiquité. »
Elle sortit de
nombreuses photos, et dit vivement :
« Tenez !
Regardez ces photos fournies par les technologies modernes ! Vous voyez ça, c’est la planète
Terre. Regardez bien, elle est
ronde ! »
Le petit confucianiste contempla les photos en silence.
Sur l’une d’entre elles, une planète bleue, notre Terre, en forme de ballon,
parut magnifique.
« Après avoir vu ces photos, quel est votre avis ? » interrogea la Grande
Personne avec une très grande fierté.
Le petit
confucianiste bredouilla : « C’est vrai que la technologie moderne ne
change pas grand chose. »
Il leva la
tête et dit :« Je me demande ce qu’aurait pensé notre maître,
Confucius, l’homme de l’antiquité, s’il avait vu ces photos. Il aurait pensé la
même chose que nous, j’en suis sûr. »
Et il expliqua ensuite : « En effet, dans notre école,
depuis des milliers d’années, les maîtres confucianistes avaient cassé un œuf,
pour montrer le jaune à leurs élèves, afin de leur faire comprendre que la
planète Terre est en forme ronde, comme un jaune d’œuf. Cette démonstration
avait duré des milliers d’années. Et bien, voyons, même avec ces photos,
il me semble que, en principe, la technologie moderne n’a pas changé la chose.
Bien au contraire, cela confirme que l'idée du jaune d’œuf du confucianiste est bonne. »
En doutant de
la véracité des propos du petit confucianiste, la Grande Personne
l’interrogea :
« Depuis des milliers d’années les confucianistes
savent que la Terre est ronde ?
- Depuis
toujours.
- Mais comment
auraient-ils pu le savoir, puisqu’ils n’avaient pas d’astronef ?
- Ce n’est pas très difficile. Vous voyez, la Terre a
laissé son ombre sur la Lune. C’est très évident, et tout le monde peut le
savoir. Avec seulement un peu de patience et un peu d’inspiration, on peut
l’apercevoir à n'importe quelle époque.
- Ho !
Mon pauvre confucianiste, je propose que vous laissiez tomber votre
démonstration du jaune d’œuf. Je vous offre un globe terrestre en plastique,
avec lequel ce sera beaucoup plus pratique de montrer la sphéricité de la
Terre. »
Avec l'air
ravi, elle en sortit un, en plastique, mais très élégant. Elle était contente
que ce petit confucianiste eut accepté enfin la thèse de la Terre ronde. Mais,
bien sûr, ce fut réussi au moyen de preuves irréfutables et d'une façon, pourrait-on dire, pas très honnête.
« C’est
vrai que votre cadeau est beaucoup plus chic que la démonstration du jaune
d’œuf. Mais c’est dommage qu’il ait un support. Sinon…
- Bien sûr,
toutes les sphères ont besoin d’un support pour tenir. Sinon... Ah !»
Semblant avoir trouvé quelque chose, la Grande Personne s’arrêta là.
C'est sûr qu’elle ne voulait plus discuter de ce
sujet. Alors, elle réfléchit un moment, puis demanda sérieusement :
« Puisque
le confucianiste sait depuis toujours que la Terre est ronde, c’est bien !
Mais soyons honnête. Pourquoi prétend-il encore que la Terre est
carrée ? Vous ne trouvez pas que c’est un peu… stupide ? »
« La
Terre est ronde ? mais ça n’a pas de sens…
- Quoi !
Il n’y a pas de sens ! »
La Grande Personne trouva que le petit confucianiste
était en train d’essayer de compliquer les choses pour échapper au ridicule.
Avec impatience, elle éleva sur-le-champ la sphère en plastique, en disant
fermement :
« Ça,
c’est la Terre ! Regardez bien, elle est ronde !
- Mais non, la
Terre n’est pas dans votre main. Elle se trouve sous vos pieds. Elle est plate,
elle n’a aucunement l’air rond, » répliqua le petit confucianiste.
Que la Terre
soit ronde ou carrée dites-vous ?
Quel drôle de
discussion !
Le petit
confucianiste se mit à chercher la cause du problème. A son avis, beaucoup de
choses ont besoin d’être prouvées parce que leur existence n’est pas claire.
Mais le fait que la Terre soit plate, c’est une chose si évidente qu’il ne vaut
pas la peine d’en discuter.
« Ce n’est qu’un problème psychologique accentué
par l’éducation, j’en suis sûr. » se dit le petit confucianiste .
Car, presque
chaque fois qu’il voulait parler de la Terre avec des grandes personnes,
c’était toujours comme s’ils entendaient un son, s’élevant de leur
subconscient, en disant :
« Homme,
il ne faut pas voir la Terre sous les pieds, parce que c’est une fausse idée.
Il faut regarder quelque chose de scientifique, comme le globe dans la main.
C’est elle la vraie Terre qui est ronde. »
Puis, elles refusaient tous les autres arguments, même la vérité.
« C’est
décidément bizarre, une grande personne ! Elle se tient debout sur la
Terre plate mais elle nous montre une boule en plastique », pensa le petit
confucianiste.
A ce moment
là, la Grande Personne chercha aussi la cause du différend.
Elle crut en avoir trouvé la raison, et dit gentiment au petit confucianiste :
« Vous vous trompez, mon petit. Si vous ne sentez
pas que la Terre est ronde, c’est parce qu’elle est très grande et que vous
êtes trop petit. Cette situation ne vous fait rien sentir. Et c'est votre sensation qui vous trompe !
- Ah
bon ! C’est curieux ! Comme je suis petit, je ne peux donc
savoir si la Terre est ronde ; autrement dit, comme elle est grande, je
n’arrive plus à me rendre compte qu’elle est ronde ? C’est drôlement
clair, votre théorie. Et alors… »
Le petit
confucianiste réfléchit un instant, puis il reprit en souriant : « Je
veux bien accepter votre théorie. Mais avant tout, je vous propose un jeu. Si
vous pouvez prouver votre théorie en jouant, je l’accepte.
- Quelle sorte
de jeu ?
- C’est
simple. Il y a trois ballons devant vous. Le premier a un mètre de diamètre, le
deuxième dix mètres de diamètre et le troisième cent mètres de diamètre. Et
voilà la règle du jeu : vous devez en choisir un et monter dessus. Selon votre
théorie, le deuxième doit être dix fois moins dangereux que le premier parce
qu’il est plus grand, et le troisième cent fois moins dangereux que le
premier, parce que vous ne sentirez plus de danger au-dessus. Si vous
choisissez le troisième, vous serez vainqueur. Et maintenant faites votre
choix ! »
Le petit confucianiste savait que, si la sensibilité à
bouger ces trois ballons était identique, la probabilité de tomber du haut
serait également la même.
A cet instant,
la Grande Personne pensa la même chose que lui. De plus, elle s’imaginait à ce que
le plus grand serait sûrement plus dangereux que le petit.
« Si je
choisis le troisième, ce sera sans doute du suicide », se dit la Grande
Personne.
Ensuite, elle
décida :
« Si c’est obligatoire, je choisis le plus
petit.
- Vous avez
perdu. Votre théorie ne peut être acceptée », déclara le petit
confucianiste.
La Grande
Personne baissa la tête et regarda les photos de la planète Terre. Puis, elle
dit royalement :
« Franchement,
je ne sais pas trop… Je pense comme ça… Mais ces photos…
- Ces belles
photos sont des preuves précieuses. Si vous n’en voulez plus, je vous en
supplie, donnez les moi toutes, je les aime bien, dit le petit confucianiste, qui
ramassa toutes les photos déployées sur la table, à côté de lui.
- Mais
oui ! C’est ce que je veux dire ! Elles témoignent que la Terre est
ronde ! s’empressa de dire la Grande Personne, qui reprit les photos
à côté d’elle.
- Mais
non ! Elles ne prouvent pas que la Terre est ronde, mais seulement que le ciel est
rond.
- Comment
cela ? » La Grande Personne fut stupéfaite par cette idée.
Il y eut un
moment de silence et elle resta là, en regardant les photos, toute déconcertée…
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