Maintenant, les deux hommes étaient très
amis, et la Grande Personne était toujours aussi étonnée par la théorie
confucianiste.
« Vraiment, pensa-t-elle, le
confucianisme est une très jolie théorie. »
Elle se rappela une phrase prononcée par une certaine
personne à un certain moment de sa vie : « C’est véritablement
utile puisque c’est joli. » Mais elle était incapable de se souvenir de
cette personne.
Elle dit au petit confucianiste :
« Ta philosophie est belle. Je veux bien en savoir
plus.
- Que veux-tu
savoir ?
- Je veux savoir comment trouver la vérité, tel le
raisonnement que tu as fait pour déclarer que la Terre se manifeste carrée à l'humanité. Ça me plaît
beaucoup, vois-tu. »
En possédant la faculté de distinguer le réel de
l’irréel, pensa-t-elle, le vrai et le faux, ce sera quand même quelque chose de
très sérieux.
Ça tombait bien. Ce que la Grande Personne désirait
connaître, c’est exactement le premier devoir de l’école confucianiste :
« l’analyse d’un objet ». Il s'appelle Gewu en chinois.
Ce fut donc pour cette raison que le petit confucianiste
lui proposa : « Trouver la vérité, ce n’est pas quelque chose de très
difficile. Commençons par analyser un objet.
- C’est une très bonne idée !
- Mais avant
tout, nous devons être au courant de la règle du jeu à respecter
- Laquelle ?
- Il ne faut pas utiliser le moyen de l’abstraction pour
analyser un objet ».
La réponse du petit confucianiste époustoufla la Grande
Personne.
D'après ses connaissances, le degré d’abstraction de la pensée représentait le niveau d’une civilisation. On lui avait inculqué au cours de sa vie que, si les ethnies barbares étaient incultes, c’était parce qu’elles n’avaient pas la capacité d’abstraire les choses. Et maintenant, ce petit confucianiste révèle ce caractère sans dissimulation. Que dire de plus…
D'après ses connaissances, le degré d’abstraction de la pensée représentait le niveau d’une civilisation. On lui avait inculqué au cours de sa vie que, si les ethnies barbares étaient incultes, c’était parce qu’elles n’avaient pas la capacité d’abstraire les choses. Et maintenant, ce petit confucianiste révèle ce caractère sans dissimulation. Que dire de plus…
« Mais c’est difficile de juger que le confucianiste
serait comme le barbare, pensa-t-elle. Peut-être est-il particulier… On dirait
qu’elle est vraiment singulière, cette école... Ce n’est pas facile de la cerner
… Mais de toute façon, le problème de l’abstraction paraît peu important pour la connaître davantage. »
A ce moment là, le petit confucianiste comprit que
son ami rencontrait une certaine difficulté en entendant son propos. Il tenta de
la résoudre :
« L’abstraction est un moyen de produire des
conceptions, n’est-ce pas ? Et puis, les conceptions ne servent qu’à la
création ou à la spéculation, n’est-ce pas ? Alors, l'abstraction va trop loin pour servir à distinguer le réel et l’irréel, le vrai et le faux.
C’est donc pour cette raison que nous devons éviter de mélanger le processus de
l’abstraction avec celui de l’analyse concrète, car les deux chemins
n’orientent jamais dans la même direction. Or, pour trouver la vérité, il serait sage de prendre le chemin de l’analyse des objets concrets, et d'esquiver le piège de l’abstraction des objets, …
- D'accord ! D'accord ! » se hâta de
dire la Grande Personne en coupant la parole du petit confucianiste.
Maintenant, elle savait qu’elle allait démarrer une expédition de la pensée sur un sentier inexploré pour elle.
« Je suis prêt à analyser un objet concret. Mais…
quel objet ?
- Ton vêtement, par exemple.
- C’est une très bonne idée. Et comment l’analyser ?
- Trouves-tu que ton vêtement est réel ?
- Bien sûr ! Je sens qu’il est doux quand je le
touche ; je vois qu’il est rouge quand je le regarde, et il garde ma
chaleur quand je le porte.
- Voilà, tu as bien défini ton vêtement par son extérieur, dit
le petit confucianiste. Mai ce n’est pas suffisant pour prouver qu’il est
réel, parce que cette définition ne s’applique qu’au phénomène, et non à la
réponse du noumène. Ça manque d’une raison profonde. Donc, nous ne la tenons
pas comme une réponse définitive. Pour l’obtenir, il faut trouver la racine du
ciel de ton vêtement. C’est par cette racine que se compose la raison !
- Ça alors, je veux bien, trouver la racine cosmique de
mon vêtement ! Est-ce qu’il faut avoir un télescope spatial ?
- Non ! On ne le cherche pas par l’extérieur. Au
contraire, il faut entrer à l’intérieur de ton vêtement. »
« Mais... il n’y a pas de mystère ! » se
dit la Grande Personne avec l’air déçu.
En effet, elle savait bien qu’il y ait une très grande
différence entre la vue de l’extérieur et l’intérieur. Une expérience très
personnelle lui avait fourni cette connaissance. A l’âge de six ans, dans l’intention de faire peur aux grandes personnes, elle réalisa une fois un
dessin qui représentait, de l’extérieur, un boa qui avalait un éléphant. Mais les
grandes personnes lui disaient toujours : « C’est un chapeau ».
Elle fut alors obligée de refaire son dessin, de l’intérieur,
qui représentait le boa en train de digérer l’éléphant, afin que les
grandes personnes puissent comprendre son idée. Mais elle n’avait pas réussi à trouver quelqu'un, chez les grandes personnes, qui lui paraissait assez lucide pour découvrir la vérité de
ces dessins. Les grandes personnes la poussait plutôt à laisser de côté ses créations qui leurs faisait peur. Alors,
pour se mettre à leur portée, elle commença à étudier la géographie,
l’histoire, le calcul et la grammaire.
Bien sûr, cette expérience dont elle se souvenait toujours
n’était qu’un jeu d’enfant, mais elle était si importante dans sa vie pour
comprendre la différence entre l’intérieur et l’extérieur. Alors, la
proposition du petit confucianiste réveilla son souvenir d’enfance, cependant, elle n’avait encore jamais pensé que cela aurait abouti à la
découverte de « la racine du Ciel » d’un objet.
Elle dit, ravie:
« D'accord. Entrons à l’intérieur du
vêtement !»
L’idée du petit confucianiste semblait peu poétique, mais
un peu trop scientifique. Entrer dans le vêtement est simple : il suffit
de changer la proportion entre l’homme et l’objet : soit qu’on se
rapetisse, soit qu’on agrandit l’objet.
« De cette manière, expliqua le petit confucianiste,
on peut trouver la porte d’entrée d’un objet. »
Les deux hommes décidèrent de se rétrécir. En le pensant,
ils réussirent à le faire.
Alors, ils tombèrent dans un monde particulier : le
pays des fils textiles.
Les fils textiles, solides comme de grands arbres,
s’entrelaçaient en réseau, provoquant une très grande difficulté à se déplacer pour
les deux hommes. Ils avançaient alors péniblement comme s'ils marchaient dans la jungle. Mais, sans oiseaux ni serpents, ce pays n’était vraiment
pas très intéressant. S’y déplaisant rapidement, ils se hâtèrent de se
rapetisser une nouvelle fois, pour trouver une autre porte sur un des fils
textiles, puis y pénétrèrent.
« Paf ! », le monde de fils textiles éclata, comme une bulle de savon, disparu en petites étoiles. Ils tombèrent alors dans le pays des celluloses. Les celluloses, nombreuses et présentes
partout, étaient de forme allongée, un peu comme des vers de terre, assez
dégoûtantes.
Les amis, qui se sentaient inconfortables sur leur peau
dans ce pays monotone, l’abandonnèrent à la sauvette, et entrèrent dans un
nouveau monde.
Le pays des celluloses finit en poussières, et fit place
à celui des glucoses. On aurait dit que les glucoses étaient des choses mangeables,
mais guère délicieuses. L’expert expliquait dans un livre que c’était parce
qu’elles n’étaient que des sucres simples.
Les amis n’en mangèrent point, et ils en laissèrent au
diable, puisque celui-ci aime bien les choses dégoûtantes.
Le voyage continua. Pendant ce temps, la Grande Personne
commença à comprendre pourquoi le petit confucianiste lui avait conseillé de ne
pas utiliser le moyen de l’abstraction. « Mais bien sûr ! Si on
abstrait les objets, on ne trouve plus la porte d’entrée. C’est là, la
vérité ! » se dit la Grande Personne au cours de son voyage.
Après que la bulle de savon du pays des glucoses eut éclaté, ils se glissèrent dans le monde des « atomes ». Ce monde
était remplit de minuscules boules qui avaient toute une forme très semblable.
Pour les distinguer, selon leur caractère spécifique, les experts appliquaient
sur chaque atome une petite étiquette d’identification. Par exemple, sur une étiquette était noté : « Carbone : il n’est pas sous forme minérale parce qu’il
n’a pas été cristallisé » ; là-bas, « Hydrogène : la petite
boule la plus légère » ; une autre, « Oxygène : une petite
boule huit fois moins légère que l'Hydrogène dans la comptabilité
scientifique », etc.
Malheureusement, dans ce pays de petites boules un peu entremêlées, le jeu de pétanque est interdit. Donc, il n’y avait rien
d’autres pour enchanter les amis, et ils choisirent précipitamment un atome,
celui de l'Hydrogène, pour y entrer.
« Ça alors ! »
Les amis ne pouvaient s’empêcher de crier lorsqu'ils tombèrent dans ce pays extraordinaire. C’est un monde, on aurait dit, presque vide, que l'on l’appelle le pays des « particules élémentaires ». Dans lequel,
enfin, pour une fois les deux hommes purent respirer
profondément, plus profondément que jamais pendant toute la durée du voyage.
Dans ce monde, ce qui est plus curieux, c’est que, dans
l’espace large, il n’y avait que certaines toutes petites particules suspendues dans le vide, comme des étoiles. Heureusement, pour reconnaître ces
toutes minuscules étoiles, les scientifiques appliquaient, de la même manière que pour les atomes, une petite étiquette identique pour chacune d'entre elles, par
exemple, «proton», «électron», « photon » etc. Parmi ces particules,
un petit noyau restait au milieu, aussi petit qu’un ballon de foot sur un
terrain de football. Et toutes les autres petites particules tournaient autour
de ce noyau, à la façon de notre système solaire.
Après un moment d’admiration, les amis se préparèrent
à entrer dans le noyau. Tout à coup, une alarme se mit à brusquement sonner. Une
voix s’éleva et répéta : « Lieu réservé ! Interdiction
d’entrer ! »
Les amis demeurèrent stupéfaits devant le noyau atomique
et essayèrent de trouver la cause, mais en vain.
L’expert leur expliqua plus tard que le noyau était
un endroit extrêmement dangereux, qui était rempli d’énergie en très haute
densité. Et cette énergie était déjà réservée à la fabrication des bombes H pour
détruire le monde.
Donc, pour cette raison militaire, le voyage à
l’intérieur du vêtement de la Grande Personne prit fin dans le monde des particules
élémentaires.
L’expert expliqua qu'il n’y avait plus de moyen pour
aller plus profondément dans cette époque dit l’époque moderne. Mais les amis ne le
regrettait pas. Pour la grande personne, il n’y avait pas de choses nouvelles dans cette
jolie aventure, toutes les choses curieuses à l’intérieur du vêtement avaient été
découvertes par les scientifiques qui avaient même écrit beaucoup de livres sur ces
sujets jusqu'à remplir pleinement des bibliothèques. Et pour le petit confucianiste,
il n’était pas besoin d’aller plus loin, ce voyage inoubliable était suffisant
pour trouver la vérité. Alors, ils étaient tous les deux satisfaits.
Mai quelle vérité ?
Où se trouvait la racine du ciel du vêtement ?
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