Désormais, le petit confucianiste et la Grande Personne, avaient tous les deux les mêmes sujets de conversations face au même monde ainsi que les mêmes curiosités face à la même nature, mais bien sûr, ils n’avaient pas les mêmes points de vue. Le petit confucianiste, alors, avec les entendements confucianistes, trésors de valeur inestimable, transmis de génération en génération, avait très envie de parler de ses connaissances avec la Grande Personne, qui était devenue son meilleur ami au monde.
Sous ce motif, un jour, le petit confucianiste sortit de sa poche son trésor, le dessin du taiji, le première œuvre qu’il avait faite lors de son époque estudiantine, et il voulut en faire cadeau à son ami. Mais il hésita, car il avait peur qu’il ne connaisse pas la valeur de cette image. En pensant aux malentendus qu’ils avaient eus auparavant, il lui demanda en lui montrant le dessin:
« Peux-tu voir les galaxies à travers cette source de vérité ? »
Il fut bien surpris d’entendre la Grande Personne répondre :
« Il y en aura ! Puisqu'il y a eu l’énergie et les matériaux de construction. Mais ce n'est pas la science.
- Tu sais, le taiji, c’est vide, l’avertit le petit confucianiste.
- Tu sais, le taiji, c’est vide, l’avertit le petit confucianiste.
- Diable ! »
Cependant, la Grande Personne était un peu matérialiste, elle s’accoutumait à toutes les choses physiques qui lui servaient, comme la première dimension de la nature.
Les matérialistes aiment bien dire que l’existence de la matière est unique, parce que celle-ci est plus importante, plus certaine et plus puissante que les autres. Tandis que le vide, ça ne sert à rien puisqu'on ne peut le mesurer et le contrôler. Mais le confucianiste n’accepte pas cette opinion. Il dit le contraire.
C’est donc qui, de la matière ou du vide, est vraiment plus important, plus certain et plus puissant ?
Grâce à ce différend, la Grande Personne et le petit confucianiste entamèrent une discussion dont le thème était le suivant : entre le bureau devant eux et le vide autour de ce bureau, qui est le plus important, le plus certain et le plus puissant?
Selon la Grande Personne, le bureau est un objet dur qui est là, tout le monde peut le toucher et le voir. Si, par hasard, le genou de quelqu'un s’y cognait fortement, sans aucun doute, ça ferait mal ; et si, d’aventure, le bureau était jeté sur votre tête, ça casserait inexorablement le cerveau. Au contraire, si vous vous cogniez contre le vide, vous vous jetteriez à l’air comme un oiseau qui vole ; et si le vide s’accumulait terriblement, avec une épaisseur d’un million de mètres, sur votre tête, vous danseriez encore comme une grenouille qui saute. Alors, c’est le bureau qui est le plus fort.
Selon le petit confucianiste, si on pouvait voir l’existence du bureau, ce serait par la grâce du vide qui donne la lumière. Si le vide ne voulait plus que ce bureau soit exposé aux yeux des hommes, il ne ferait qu’un fort yin, l’enveloppant de noir, et on ne le trouverait plus. De même, si l’on voulait jouer, peu importe du genou ou de la tête avec ce bureau, ce serait aussi par la grâce du vide qui laisserait le bureau exister. Si le vide ne voulait plus que l’on fasse joujou avec celui-ci, il ne ferait qu’un fort yang, augmentant la température à mille degrés, le bureau alors partirait tout de suite en fumée. Mais que peut-il faire le bureau, contre le vide ? Rien !
Alors, c’est le vide qui l’emporte.
Après cette discussion, la Grande Personne commençait à se rendre compte de l’importance du vide.
« Bah ! Avec le yin-yang, le confucianisme changera le monde ! dit la Grande Personne en réfléchissant. Alors, si je comprends bien, le yin-yang n’est pas quelque chose uniquement de Chine, comme une culture possédée par les Chinois. C’est en effet... une sorte d’énergie cosmique, n’est-ce pas ? Quelque chose pour tout le monde ?
- Exact ! dit le petit confucianiste. Quelque chose de réel qui s’applique à tous les hommes, non seulement l’humain de la Terre, mais aussi les hommes qui vivent sur les autres planètes.
- C’est trop exagéré ! Ce n’est que sur notre Terre, il y a déjà beaucoup de gens qui ne connaissait pas le yin-yang. Même pour moi, ta Grande Personne, qui n’en saisis encore pas bien le sens.
- Tu vas arriver, mon ami. Parce que le yin-yang remplit l’Univers tout entier. Grâce à sa réalité universelle qui nous impressionne par les mouvements du vide unique, le principe de yin-yang peut être comprit pour tous les hommes cosmiques, y compris toi, ma Grande Personne.
- Les mouvements du vide unique ?
- Selon ton terme, c’est l’énergie cosmique.
Le petit confucianiste précisa encore : « Dans l’école confucianiste, l'énergie n’est pas un concept abstrait qui demeure seulement dans le cerveau humain, définit par les autres mots. Elle est concrète, voire vivante. Pour en exprimer la vivacité, dans la tradition, le confucianiste donne un nom spécial à ces mouvements en chinois : Qi, qui signifie les mouvements du vide.
De plus, étant donné que les mouvements du vide sont procédés uniquement par la forme de taiji, dans ce cas, on peut les catégoriser plus précisément. D’une manière générale, si les mouvements viennent du vide unique, ils sont nommés yuan qi. Ça signifie l’énergie originaire. Et si les mouvements proviennent des matières, ils sont nommés jing qi. Ça signifie l’énergie physique.
- Attends, attends, la Grande Personne coupa le petit confucianiste. Jing qi, yuan qi, avec tous ces qi, j'ai beaucoup cassé la tête dans le mysticisme oriental. »
A l’égard du sens, parfois, on a besoin de l’aide des dictionnaires. Mais sur ce sujet, la Grande Personne avait des expériences désagréables. Elle subissait les bruits des experts quand elle avait ouvert les dictionnaires : « Le qi est un concept spirituel, un mot chinois pour traduire esprit, vapeur, exhalaison, fluide, influx, énergie etc., et le terme le mieux adapté étant les souffles », etc., etc., etc..
Quelle équivoque ! Un mélange confus de choses ou d’idées jetées ensemble sans aucune règle. Si on se cogne à ce terme, on se cogne la tête contre les murs.
Sans doute, le terme qi a eu une mauvaise réputation en Europe.
«Avec les termes énergie originaire et énergie physique, je comprends mieux, dit la Grande Personne. Ça éclaire des choses. Pour que la théorie confucianiste soit facile à comprendre, mon ami, je te donne un conseil : abandonner le vocable fluide comme qi et profiter de la familiarité du mot énergie.
- C’est une bonne idée peut-être. .. Mais …»
Cependant, le petit confucianiste avait une autre préoccupation. Il se dit en lui-même:
« Malheureusement, le mot énergie a été défini par la science. Si on l’emprunte directement ainsi, ça écrasera la vérité avec la définition scientifique. »
Il avait une bonne raison de s’en préoccuper. Car le terme scientifique énergie ne signifie que la capacité d'un système à produire un travail, entraînant un mouvement, de la lumière ou de la chaleur. Tout ça, du point de vue confucianiste, ne représente que l’énergie de yang. Il manque, dans le système scientifique, l’énergie de yin, qui produira un travail, entraînant un repos, de l’obscur, de la langueur. De plus, le terme scientifique énergie n’est qu’une grandeur physique, quantifiable et mesurable. C’est à dire qu’il ne s’agit que de l’énergie physique. Les scientifiques ne prennent pas l’énergie originaire à leur compte, car celle-là ne peut être généralement quantifiée et mesurée.
Après que la Grande Personne ait prit la plainte du petit confucianiste, elle lui consola :
« Laissons tomber la définition scientifique, on peut comprendre tout ça. Un peu d’explications, ça suffit.
- D'accord, dit le petit confucianiste. »
« Utilisons le terme énergie au sens confucianiste à expliquer de nouveau notre Univers, c’est un essai que je préfère. Peut-être gagnera-t-on en lucidité par cette méthode, sur le monde qui a perdu son orientation ! pensa Grande Personne. »
Mais de quelle lucidité s’agit-il ?
Il s’agit de tout, tout notre Univers, comme si notre Univers n’est une scène établie que pour les taiji.
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